L’api-foresterie est la pratique qui lie l’apiculture à la composante arborée – arbres et arbustes – de nos paysages.
Pour la diversité

La composante arborée a été, de tout temps, d’un apport décisif pour les abeilles et autres pollinisateurs : Habitat, nutrition, fourniture de pollens diversifiés, apports de nectar, miellats, résines… en dépendent.
Cette composante assure de riches miellées (on pense au miel d’acacia, de tilleul, de châtaignier, de bourdaine, d’arbousier…) et à l’avantage de présenter une grande résilience face aux aléas climatiques (sécheresses et vagues de chaleur) et autres, dont profitent les abeilles.
L’api-foresterie veille sur cette composante et se propose de l’enrichir pour le plus grand bien des abeilles et pollinisateurs. Il s’agit de maintenir et d’accroître sa diversité, en assurant les périodes de floraison les plus longues et continues, pour fournir nectars et surtout pollens diversifiés y compris dans les périodes où la flore traditionnelle est pauvre en floraisons (on pense aux floraisons estivales , tardives et très précoces).
La recherche a en effet démontré que l’alimentation pollinique était essentielle pour la santé des abeilles (pour résumer, plus les pollens sont variés, plus les acides aminés absorbés sont complets), et pour leurs réserves corporelles en lipoprotéines (la vitellogénine).

Les saules et osiers sont pourvoyeurs de pollen et nectar très tôt en saison.
Face au réchauffement climatique
Le réchauffement climatique accélère les floraisons de notre flore et allonge les périodes de rareté (tilleuls et châtaigniers par exemple ont avancé de trois semaines leurs floraisons par rapport à ce qu’elles étaient en 1950…) et chaque degrés supplémentaire accéléré de huit à dix jours ces floraisons…

Qu’en sera t’il en 2050 avec deux à trois degrés de plus? Les canicules défavorisent les floraisons des fleurettes champêtres, celles des délaissés et des bas cotés. La composante arborée en ces cas agit comme une garantie minimale de fourniture de nectar et pollen.
Les hivers doux, de plus en plus fréquents, sont aussi des cas à prendre en considération. Les abeilles sortent alors que les végétations sont quasiment sans floraisons, hormis quelques rares plantes.

Floraison estivale longue et plébiscitée par les abeilles.
L’api-foresterie promeut les arbres et arbustes mellifères traditionnels, amplement décrits par ailleurs mais aussi celles qui vont en compléter les calendriers de floraisons en visant :
- Des arbres et arbustes »oubliées » comme la viorne-tin ou les saules, pour l’hiver, ainsi que des arbustes estivaux comme le gattilier ou le Romarin.
- Des créations horticoles, proposées pour justement fleurir dans les époques de rareté comme les Lagerstremia estivaux, les céanothes hybrides ou encore les Elaeagnus d’automne…
- Des arbres et arbustes, issus des flores tempérées d’autres zones du Monde, déjà présents en rares exemplaires dans nos arboretums et nos villes et qui pourraient compléter la flore champêtre (on pense ici aux Koelreuteria, Sophora japonica, Tetradium et Castanea seguinii pour les fins d’été, aux arbustes, Mahonia ou buddléias à floraisons précoces…).

Une approche diversifiée

(prunelier, noisetier, cornouiller mâle, saule, érable)
La palette de l’api-foresterie est finalement large et amenée à s’élargir encore grâce à de nouvelles créations horticoles et à de nouvelles introductions contrôlées.
Les végétaux venus d’ailleurs et parfois déjà sélectionnés offrent des cultivars supérieurs en qualité mellifères.
Les méthodes de plantation de l’api-foresterie sont multiples :
- Plantations en jardins,
- Introduction dans des haies et bosquets existants pour en augmenter la diversité,
- Plantation de bosquets spécifiques, sous forme d’îlots de biodiversité, concentrant des arbres et arbustes spécifiquement choisis pour valoriser de petits espaces délaissés, compléter la flore locale et ainsi réduire les plages de déficits alimentaires..

Fleurs parfumées et fruits en automne.
Améliore les sols en fixant l’azote atmosphérique.
En devenir…
L’api-foresterie nécessite des apports de la Recherche :
- Pour accroître la palette des arbres et arbustes utiles,
- Pour sélectionner des cultivars plus mellifères, dotés de caractéristiques phénologiques intéressantes (dates et durées de floraisons), de qualité pollinique supérieure ou de production supérieure de nectar…
Elle nécessite aussi des expérimentations, telles que :
- Des introductions raisonnées à échelles de paysages visant à une alimentation longue et diversifiée des abeilles et autres pollinisateurs.
- Des re-création d’habitats arborés semi-naturels nécessaires à une apiculture pérennisée face aux défis environnementaux à affronter.
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